Les Irakiens se préparent en vue de leur première élection depuis 50 ans
(Une Assemblée démocratiquement élue rédigera la nouvelle constitution.) (1200) Par David Shelby Rédacteur du « Washington File »
Washington - On estime à 13,9 millions le nombre d'Irakiens qui pourront voter le 30 janvier 2005, lors de la première élection parlementaire ouverte, directe et multipartite à être organisée dans leur pays depuis plus de 50 ans.
Plus de cent partis, coalitions, et personnalités sont en lice pour les 275 sièges à l'Assemblée nationale transitoire. Si l'on compte tous les candidats indépendants et tous les noms figurant sur les listes représentant des partis, il y a plus de 7.000 candidats pour ces sièges. Les électeurs n'auront qu'un seul choix : soit une liste représentant un parti, soit un candidat individuel.
Les sièges à l'Assemblée seront assignés sur la base d'une représentation proportionnelle. Un candidat ou parti qui recevra 1/275e des voix aura un siège. Un parti qui recevra 20 % des voix remportera 20 % des sièges, lui permettant ainsi d'envoyer les 55 personnes figurant en tête de sa liste à l'Assemblée.
Le principal but de l'Assemblée sera de rédiger une nouvelle constitution pour l'Irak. En vertu de la Loi administrative transitoire, alors qu'elle élabore la constitution, l'Assemblée doit encourager le débat par le biais de réunions régulières ouvertes au public dans toutes les régions d'Irak, ainsi que par le truchement des médias et en encourageant des propositions de la part des citoyens.
L'Assemblée a jusqu'au 15 août 2005 pour élaborer une nouvelle constitution. Ce projet de constitution sera ensuite rendu public et soumis à un référendum général avant le 15 octobre 2005. Si les électeurs irakiens votent en faveur de ce document, des élections nationales tenant compte des dispositons de la nouvelle constitution auront lieu le 15 décembre 2005 au plus tard et un nouveau gouvernement assumera le pouvoir le 31 décembre 2005.
Pendant la période de transition, l'Assemblée aura aussi le rôle de législature nationale et elle encadrera les responsables de l'exécutif qu'elle aura choisis. Les membres de l'Assemblée choisiront parmi eux un président et deux présidents adjoints qui auront les fonctions de chefs d'Etat. Ce Conseil présidentiel disposera de deux semaines pour choisir un premier ministre ; ce dernier aura un mois pour former un conseil des ministres. Les ministres seront soumis à un vote de confiance de la part de l'Assemblée avant d'assumer leur position.
Les Irakiens devront aussi élire leurs représentants aux Conseils régionaux : 41 sièges sont à pourvoir dans les provinces et 51 dans la capitale, Bagdad. Au Kurdistan, ce sont les 111 membres du Parlement autonome du Kurdistan qui devront être élus.
Les élections du 30 janvier 2005 seront les premières élections parlementaires multipartites depuis 1953. Durant la première moitié du XXe siècle, l'Irak, alors en proie à une période de turbulences politiques caractérisées par de nombreux gouvernements de très courte durée, prit quelques mesures limitées pour établir une monarchie constitutionnelle. Après le coup d'Etat de 1958 mené par le général d'armée Abdul Karim Kassem, il n'y eut plus d'élections jusqu'à la création, en 1980, d'une Assemblée nationale strictement contrôlée par le parti baassiste.
Qualifications des candidats
En vertu de la Loi administrative transitoire, les candidats à la nouvelle Assemblée nationale transitoire doivent être âgés de 30 ans au minimum et avoir un diplôme d'études secondaires. Ils ne peuvent pas être des membres actifs de l'appareil militaire et ne neuvent pas avoir été des responsables de haut rang du parti baassiste. Les candidats ne peuvent pas non plus avoir travaillé pour des organes gouvernementaux de répression, tels que les services secrets de l'ancien régime, s'être enrichis personnellement avec les finances publiques ou avoir été inculpés de crimes de mœurs.
Les personnes et les partis souhaitant figurer sur le bulletin de vote ont dû soumettre à la Commission électorale indépendante, avant le 15 décembre, une pétition signée par 500 personnes au moins. Certains candidats se sont présentés indépendamment d'un parti quelconque. Les listes des partis doivent comporter 12 candidats au moins et 275 au plus.
Par ailleurs, un tiers des candidats figurant sur les listes de partis doivent être des femmes. La Commission électorale a adopté cette règle afin de satisfaire l'objectif énoncé dans la Loi administrative selon lequel au moins 25 % de l'Assemblée devaient être des femmes.
Des partis de l'ensemble du pays ont enregistré leur liste de candidats. Parmi les partis les plus connus, on note l'Alliance nationale unie à majorité chiite ; l'Alliance kurde ; l'Accord national irakien, parti laïque du premier ministre Allaoui ; le Parti irakien, parti du président al-Yawar.
Préparations des élections
Le 20 décembre, la Commission électorale a organisé une loterie télévisée à l'échelle nationale pour déterminer l'ordre dans lequel les listes des partis et les candidats indépendants figureront sur le bulletin de vote. Afin de faciliter le choix de l'électeur confronté à un bulletin de vote comportant de nombreuses informations, celui-ci comportera le nom exact de chacun des partis ayant présenté une liste de candidats ainsi que le symbole par lequel il est reconnu et un numéro.
La Commission électorale est indépendante de tout autre organe gouvernemental. Ce sont des responsables de l'ONU qui ont choisi les huit commissaires parmi quelque 1.800 candidats originaires des quatre coins de l'Irak. A dessein, elle n'est affiliée à aucun parti politique.
La Commission a employé 6.000 Irakiens afin de faciliter l'inscription des Irakiens sur les listes électorales et l'enregistrement des candidats. La liste des électeurs en puissance se fonde sur la liste actuelle des gens bénéficiant de la distribution de vivres. Les Irakiens ont eu six semaines pour corriger les éventuelles erreurs et ont pu le faire dans n'importe lequel des 500 bureaux d'inscription dispersés dans le pays.
La Commission s'emploie aussi à embaucher et à former plus de 100.000 Irakiens qui travailleront ou auront un rôle d'observateur dans les 6.000 à 7.000 bureaux de vole le 30 janvier 2005. Plusieurs organisations non gouvernementales et partis politiques préparent aussi leurs membres au rôle d'observateur des élections.
L'emplacement exact de tous les bureaux de vote n'a pas encore été annoncé, mais il est prévu d'utiliser des lieux qui pourront être facilement sécurisés et à l'intérieur desquels les gens pourront faire la queue. Seuls des ressortissants irakiens seront chargés de veiller au bon déroulement des élections.
Les Irakiens habitant hors de l'Irak pourront aussi voter. La Commission a identifié 14 pays où réside un grand nombre d'Irakiens à qui elle aimerait pouvoir donner la possibilité de voter. Pour l'instant, seuls l'Australie, le Canada, le Danemark, la France, l'Allemagne, l'Iran, la Jordanie, les Pays-Bas, la Suède, le Royaume-Uni et les Etats-unis ont consenti à accueillir des bureaux de vote. Des discussions se poursuivent avec la Syrie, la Turquie et les Emirats arabes unis.
Tous les citoyens irakiens âgés de 18 ans au moins, ainsi que les Irakiens n'ayant plus la citoyenneté irakienne mais qui peuvent légalement la recouvrer, ont le droit de voter dans l'un ou l'autre des bureaux de vote organisés dans ces pays. Le manque de données démographiques peut rendre difficiles les prévisions en ce qui concerne le nombre d'Irakiens expatriés qui pourraient souhaiter voter à l'étranger, mais la Commission électorale se déclare prête à traiter un million de ces votes. Article retransmis par :acharif moulay abdellah bouskraoui